L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs

L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs Imaginez une colline douce, baignée par le soleil de la Drôme, où trône une tour médiévale aux pierres usées par le temps. À ses pieds, quelques centaines de mètres plus bas, une fumée légère s’échappe d’un alambic centenaire, tandis qu’un jeune homme aux mains agiles ajuste le feu de bois. Ce tableau n’est pas une scène d’un roman d’antan, mais une réalité bien vivante en 2025 : celle de Corentin Rignol et de son Alambic de la Tour d’Albon. Cette aventure, c’est l’histoire d’un retour aux sources, d’un rêve porté par les souvenirs d’enfance et d’une passion pour les saveurs qui dansent entre tradition et innovation. Embarquons ensemble pour découvrir ce récit où le passé et le présent se mêlent dans chaque goutte distillée.

L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs
L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs

Un héritage dans les vergers

Corentin Rignol n’est pas un inconnu dans les terres vallonnées d’Albon. Né à Anneyron, un village voisin, il a grandi dans la ferme de ses arrière-grands-parents, un lieu où le temps semblait suspendu. Les murs de cette bâtisse rustique résonnaient des rires de sa grand-mère et des secrets qu’elle murmurait en préparant ses liqueurs. « Une goutte de verveine, un soupçon de patience », disait-elle en remuant une mixture odorante, un sourire complice aux lèvres. Ces moments, gravés dans la mémoire de Corentin, étaient bien plus que des souvenirs : ils étaient une promesse.

La Tour d’Albon, vestige médiéval dressé comme un gardien silencieux sur la colline, faisait aussi partie de son paysage d’enfance. Elle n’était pas qu’un tas de pierres pour lui ; elle incarnait l’histoire du Dauphiné, ces terres où ses ancêtres avaient labouré, récolté, vécu. « Elle veille sur nous depuis des siècles », aimait-il penser, fasciné par sa silhouette altière. Pourtant, rien ne prédestinait ce garçon rêveur à devenir le distillateur qu’il est aujourd’hui. Après des études en contrôle qualité et commerce, il a travaillé dans des laboratoires, analysant des données avec rigueur. Musicien à ses heures perdues, il jouait des mélodies qui faisaient vibrer les salles locales. Mais au fond, une autre mélodie l’appelait : celle des fruits mûrs et du feu qui transforme.

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Le déclic : une vieille recette et un alambic oublié

Tout a basculé un soir d’hiver, alors que Corentin feuilletait un carnet jauni retrouvé dans le grenier familial. Entre les lignes manuscrites de sa grand-mère, il découvrit une recette de liqueur à la verveine, annotée de petits dessins et de conseils précis. Ce n’était pas juste une liste d’ingrédients ; c’était un morceau d’histoire, un lien tangible avec ceux qui l’avaient précédé. « Et si je ramenais ça à la vie ? » se demanda-t-il. Cette question fut le premier pas d’un voyage qui allait changer sa vie.

Mais faire revivre une recette demandait plus qu’une casserole et un rêve. Il lui fallait un alambic, cet appareil mythique des bouilleurs de cru, et surtout, le savoir-faire pour le maîtriser. Corentin n’a pas hésité : il a tout lâché pour se former à Laval, auprès du Syndicat national des Bouilleurs ambulants. Là, il a appris à dompter le feu, à écouter la vapeur, à capter l’essence d’un fruit dans une goutte d’alcool. Et puis, il l’a trouvé : un alambic à vapeur de 1925, rouillé mais majestueux, abandonné dans un coin de l’Yonne. « Il m’attendait », raconte-t-il avec un sourire. Après des mois de restauration, il l’a ramené à Albon, prêt à lui redonner vie.

L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs
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Naissance de l’Alambic de la Tour d’Albon

En 2023, la ferme familiale s’est transformée. Sous l’ombre bienveillante de la Tour d’Albon, Corentin a installé son alambic et fondé sa distillerie, d’abord appelée « La Distillerie de la Tour », avant de devenir « L’Alambic de la Tour d’Albon ». Ce nom, il ne l’a pas choisi au hasard. C’était un hommage à la tour qui l’avait vu grandir, mais aussi à l’instrument qui allait porter son rêve. « L’alambic, c’est le cœur de tout ça », explique-t-il. Avec son appareil chauffé au bois, il pouvait contrôler chaque étape, comme les anciens bouilleurs l’avaient fait avant lui.

Les premières gouttes ont coulé : une eau-de-vie de poire William, tirée des fruits dorés de Saint-Sorlin-en-Valloire, un village voisin. Le goût était pur, intense, comme un écho des vergers de son enfance. Puis est venue la liqueur de verveine, inspirée de la recette de sa grand-mère, avec des plantes cueillies à deux pas de la tour. Chaque bouteille était une célébration de la Drôme, de ses terres généreuses et de ses saveurs brutes. « Je veux qu’on goûte le coin où j’ai grandi », dit-il avec fierté.

L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs
L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs

Réinventer le pastis et raviver une tradition

Corentin n’est pas homme à s’arrêter. En 2024, après six mois d’expérimentations, il a lancé son pastis « made in Drôme ». Pas une imitation des classiques provençaux, mais une création unique, ancrée dans son terroir. « Pourquoi importer des saveurs quand on a tout ici ? » plaisante-t-il. Ce pastis, distillé avec des plantes locales, est devenu une signature, un clin d’œil audacieux à la modernité tout en restant fidèle à ses racines.

Mais son projet le plus audacieux a vu le jour en octobre 2024 : le service de bouilleur ambulant. Dans une région où le privilège des bouilleurs de cru s’était éteint en 1959, Corentin a décidé de le ressusciter à sa manière. Avec son alambic mobile, il sillonne désormais les villages, transformant les récoltes des particuliers en eaux-de-vie personnalisées. « Les gens m’apportent leurs pommes, leurs prunes, leurs histoires », raconte-t-il. « Et moi, je leur rends une bouteille qui raconte leur année. » Ce service, c’est plus qu’un métier : c’est un lien renoué avec une tradition perdue, une façon de rassembler les gens autour du feu et de la distillation.

Une philosophie dans chaque goutte

À l’Alambic de la Tour d’Albon, tout est fait main, de la distillation à la mise en bouteille. Corentin sélectionne ses ingrédients avec soin : les poires viennent des vergers voisins, la verveine pousse au pied de la tour, et même le bois qui alimente l’alambic est coupé localement (par lui même, accompagné de son grand-père). « Si ça ne vient pas d’ici, ça n’a pas sa place dans mes bouteilles », affirme-t-il. Cette exigence, c’est sa manière de rendre hommage à la Drôme, à ses paysages vallonnés et à ses habitants.

Son entreprise est encore jeune, mais elle porte déjà une ambition claire : faire rayonner les saveurs locales au-delà des frontières du département. Pourtant, pour Corentin, le succès ne se mesure pas seulement en chiffres. « Si quelqu’un goûte mon eau-de-vie et me dit qu’elle lui rappelle son grand-père, alors j’ai gagné », confie-t-il, les yeux brillants

Une histoire qui ne fait que commencer

Aujourd’hui, en mars 2025, l’Alambic de la Tour d’Albon est plus qu’une distillerie : c’est un symbole. Un symbole de résilience, de créativité, et d’un amour profond pour ses racines. Corentin Rignol, avec son alambic centenaire et ses rêves intacts, incarne cette génération qui regarde en arrière pour mieux avancer. Sous la Tour d’Albon, il écrit une nouvelle page d’une histoire qui sent bon la poire, la verveine et le bois brûlé.

Alors, la prochaine fois que vous croiserez une bouteille estampillée « L’Alambic de la Tour d’Albon », prenez le temps de la savourer. Derrière chaque gorgée, il y a un jeune homme qui a écouté les murmures de sa grand-mère, les leçons d’un alambic fatigué et le chant d’une tour millénaire. C’est une invitation à goûter la Drôme, oui, mais aussi à croire qu’avec un peu de feu et beaucoup de cœur, on peut faire renaître ce qui semblait perdu.

L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs
L’Alambic de la Tour d’Albon : Une histoire de racines, de feu et de saveurs

Albon, France, 26140

* Le bouilleur de cru est un particulier, récoltant de fruit de son propre verger, qui souhaite faire distiller ces fruits pour la consommation de son foyer.


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